Au revoir Azerbaidjan !
Nous voici enfin sur le ferry, encore à quai mais à moins de deux heures du départ. Et je peux dire “enfin »car nous avons dû user de notre patience et de notre résilience. Arrivés dans la nuit du 15 au 16 mai à Bakou, la journée du 16 mai a été consacrée au repos, la récupération, la lessive, le tri des photos… Pendant ce temps, Eric, Edouard et Paul ont été dédouaner les motos et les véhciules d’assistance, en tous cas essayer. Les camions de transport arrivés à Bakou ont d’abord été envoyés à Alat à 70 km au Sud. Alat est le port d’embarquement pour les ferries à destination d’Aktaou au Kazakhstan, ou pour les cargos pour Bandar Andali en Iran. En fin d’après-midi, les camions ont dû retourner pour le dédouanement à Bakou, puisque le transport aboutissait à Bakou officiellement.
On reste zen et nous nous retrouvons le soir pour le dîner. Le plan est clair: demain matin, tenez-vous prêts à venir chercher vos motos en début d’après-midi. Un bus passera vous prendre. Une fois les motos dédouanées, déchargées et récupérées, nous devrons nous diriger vers Alat pour embarquer en fin d’après-midi.
Vers 10h le test PCR est organisé à l’hôtel. Nous rendons la clef de la chambre vers 9h. Sitôt le test PCR terminé, les consignes sont données de se tenir prêt à partir à 15h. Nous allons donc en ville pour un tour de la vieille ville, un passage au bureau de change et un déjeuner au frais et au calme.
14h30, nous sommes de retour à l’hôtel. Les nouvelles ne sont pas bonnes. Les camions sont retournés à Alat car nous ne pouvons pas conduire les motos en Azerbaidjan pour une raison qui m’échappe encore. Il faut donc les dédouaner puis les décharger à Alat dans la zone sous douane. On oublie l’idée de prendre le ferry ce soir.
15h, un bus arrive avec un guide francophone. Il nous emmène à Qobuzan voir un site sur lequel ont été découverts plus de 4000 pétroglyphes datants de 20000 ans pour les plus anciens. C’est un site très émouvant à ciel ouvert parcouru par un sentier balisé pour éviter les serpents endémiques dans ces lieux. Les pierres sont exposées au vent et aux pluies et la dégradation est continue bien que lente. Comme il est tentant de mettre les mains sur les pierres et les doigts sur ces sillons creusés par des hommes qui invoquaient une bonne chasse ou représentaient leurs prises.
Beaucoup d’animaux bien sûr, sauvages ou à peine domestiqués comme des aurochs avec une corde au cou. Des scènes de danse ou dans des bateaux, des corps féminins aux formes rondes. Parmi les animaux sauvages, on compte des animaux de savane dans les gravures les ;lus anciennes, témoignage du changement climatique qui a affecté la région. Et la mer Caspienne qui n’était sans doute pas fermée à l’époque comptait aussi des dauphins.
La visite suivante a nécessité un transfert dans des Lada affrétées pour l’occasion. Datant de 1992, notre fringante Lada bleue prend la route puis la piste. Le chauffeur manie le volant et la boite avec entrain et le vieux véhicule rebondit sur les bosses et les ornières. Les suspensions sont souples, un brin fatiguées. Les sièges sont défoncés, la carrosserie est perforée par endroits, les freins sont directs et sans ABS, l’embrayage patine… C’est un moment de nostalgie de l’empire soviétique qui nous est donné. Le but de la balade n’est cependant pas juste mécanique. Nous allons vers un champ de volcans de boue. Sur la plaine apparaissent des structures, mi termitières mi collines. Et ce sont de véritables volcans qui crachent du gaz méthane sous forme de bulles qui viennent mollement se former à la surface de petits lacs de boue. Ici et là des coulées de boue se forment et les sommets des ces monticules sont assez instables; un pas un peu lourd près du cratère et la coulée menace.
Une petite vidéo de ce phénomène est disponible ici.
Le bus nous emporte ensuite en ville pour un dîner dans un restaurant-musée en compagnie des deux responsables de l’agence qui nous facilite les démarches en Azerbaidjan. Puis avec le guide nous entamons un tour de Bakou by night. Un verre sur une terrasse en haut d’un immeuble et nous retrouvons l’hôtel à minuit passé.
Pendant ce temps, les motos enfin dédouanées ont été déchargées des camions, remises en ordre de marche (remontage des valises…) et alignées dans un espace sécurisé de la zone douanière d’Alat. L’équipe d’Eric est épuisée mais a fait un travail remarquable de patience et de logistique.
Ce matin debout bien tôt avec consigne d’être prêts au départ à 9h. Le ferry a dû arriver ce matin vers 2h et le temps de décharger et recharger nous devrions être au port vers 10h. Sauf que le ferry est arrivé en retard. La consigne change et les mini-bus viendront nous chercher vers 12h30. Je fais une sieste improvisée dans le lobby de l’hôtel. Arrivés à 13h30 au port d’Alat, les démarches commencent. Nous sommes tombés sur un douanier pointilleux qui veux TOUT contrôler sur chaque moto. L’attente continue et la tension monte. Le douanier continue imperturbable; les neurones ne se touchent visiblement pas. Tous les sacs sont passés au scanner. Le douanier vérifie tous les outils du 4×4, veut voir les pneus de rechange que nous emportons.
Le ferry est supposé partir à 17h; nous sommes libérés des douanes vers 17h30. Le cortège de motos se présente à l’embarquement entre les rails qui mènent droit sur le bateau. Il est en effet conçu pour embarquer des wagons. Les voies de chemin de fer se croisent sur le pont. Autant dire que conduire une moto sur ce genre de terrain avec un pont bien gras est des plus périlleux.
Sur le pont trois camions bloquent le passage. Ils veulent reculer, nous voulons avancer. Conflit ordinaire avec voix tonitruantes des routiers. Nous passons sur le côté, tant bien que mal. Les camions reculent et il s’avère que ces trois camions sont en fait les derniers à débarquer. Oops!
Sur l’avant, le pont du bateau est ouvert et une énorme plate-forme élévatrice permet aux wagons de descendre un étage et entrer dans les entrailles du géant, au pont inférieur. Les motos parquées sur la plate-forme font leur descente en compagnie des pilotes. Nous sommes dirigés tout au fond du bateau, à l’arrière. Mais ce qui semble une place de choix sera une malédiction au débarquement: premiers entrés, derniers sortis.
L’embarquement se poursuit toute la soirée. La rumeur dit que le ferry ne part qu’une fois plein. Les camions entrent au compte-goutte, tranquillement, lentement, en cahotant sur les rails et les points de saisine. Les motos et les 4×4 sont rangés, nous essayons d’avoir nos cabines. Mais ce sont des cabines de quatre, pas évident pour les couples qui préfèreraient être seuls. Et puis nous sommes en pays musulman, il y a des cabines d’hommes et des cabines de femmes. Le conflit avec la rouquine chargée de répartir les cabines est inévitable.
Vers 21h30 le restaurant ouvre enfin. C’est une petite salle avec quelques tables de 4, 6 ou 8. Les chauffeurs routiers se ruent là dedans, suivis par notre groupe dont une partie qui vient de descendre une bouteille de whisky a les pommettes bien rouges. Les assiettes pleines sont déjà sur la table, il faut se servir de soupe au comptoir puis trouver une place sur ces tables communes. Je me retrouve à côté de deux chauffeurs kurdes qui viennent de Turquie et vont en Ouzbékistan. Je leur explique que nous sommes français et allons jusqu’à Bishkek, ce qui provoque déjà leur admiration, puis que nous continuons par l’Iran et le Pakistan jusqu’en Inde pour faire le tour du Monde, ce qui déclenche alors un regard d’incrédulité. “Dangerous!” “Hell, yes!”
Après le repas nous “admirons » encore le chargement des derniers camions. Le pont est plein. Il est 23h et nous ne sommes pas encore partis. Je rejoint ma banette et commence à rédiger cet article. Minuit, dodo, nous sommes encore à quai. Dans la nuit je me réveille. Pas une vibration, pas un bruit au delà de la ventilation. Nous devons être encore à quai… Mais ce navire est flambant neuf et équipé de machines exceptionnelles; nous sommes bien en route mais avec une stabilité et un confort époustouflants.
Hello Ghislain!
Quelles expériences pour toi/vous et quelle chance pour nous que tu prends le temps pour nous poster récits, photos et vidéo après de longues journées de route, et quelles routes!! Merci 🙂 pour les beautés magnifiques des pétroglyphes à Qobuzan et la vidéo impressionnante des volcans de boue. Tant de merveilles grâce à toi. Que Dieu te bénisse! Bonne continuation en beauté, santé et sécurité! A bientôt. Biz
Quel talent de narrateur, on est là avec toi ! Sache qu’on ne t’oublie toujours pas. Encore aujourd’hui, au R2 ton aventureuse épopée était un de nos sujets de discussion ! Tu imagines bien que nos interprétations de cette aventure qui prend des airs picaresques divergent. Comme quoi, lire attentivement puis interpréter correctement une trajectoire sur une carte n’est pas donné à tout le monde! Je suis d’accord avec ton choix de dénomination des plans alternatifs : les identifier avec les seules lettres de l’alphabet n’en permet de 25 ! Soit prudent. Tout de bon.
Merci Pierre et passe bien le bonjour aux copains; je connais maintenant quelques plats et boissons qui feraient un tabac au R2! Et si d’aventure il y avait une incertitude sur l’interprétation des indices donnés sur le blog, il n’y a qu’à demander! 🙂
Cordialement!